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10 février 2011 4 10 /02 /février /2011 10:35

bExo3219Dore MosesBreakingTheTablesOfTheLaw

L’absence de Moïse

 

 L’une des particularités de notre paracha est l'absence du nom de Moïse. En effet, à aucun moment Moïse n’est cité nominativement. L'étonnement peut être justifié, car le fils d'Amram apparaît du début de l'Exode (sa naissance) jusqu'à la  fin de la Torah (sa mort).

 

Pourquoi le nom de Moshé n’est-il pas mentionné ici ? Pourquoi est-il évoqué uniquement comme un ata, « toi » : « Et toi, ordonne aux enfants d'Israël… »

 

La  raison nous est offerte par le Midrash, qui voit dans cette occultation, la conséquence de la demande du prophète, après la faute du veau. 

 

Suite à la volonté divine de recommencer l'histoire d'Israël uniquement à partir de Moïse, ce dernier déclare : « Pardonne donc à ce peuple-là, sinon efface-moi de Ton livre. » Et le Midrash de déclarer : « Toute parole d'un homme juste ne revient jamais vide. » Rivka avait dit :  « Pourquoi vous perdrai-je tous les deux ? » La tradition nous annonce que Jacob et Esaü sont morts le même jour. En prononçant  sinon efface- moi de Ton livre, Moïse a vu son nom disparaître de la paracha Tétsavé.

 

Freud nous a appris qu'aucune parole n'était jamais vaine. Le lapsus, le jeu de mots, la méprise, toutes ces formes verbales  expriment un discours sous le discours.

Dans quel contexte, exprime-t-il sa requête ? Après la faute du veau d'or. L'Eternel veut construire une nouvelle identité d'Israël, à partir de Moïse, disons à partir de la seule tribu de Lévi, restée fidèle au monothéisme.

 

Dans ce dialogue anthropomorphique, Dieu se situe au plan de la rigueur absolue. Il veut créer une élite juive. Nous connaissons ce thème dans le Midrash. « Le Saint, béni soit-il, voulut créer le monde à partir de l'attribut de justice, mais constatant que le monde ne pouvait subsister, Il ajouta l'attribut de miséricorde. » Au plan de la justice absolue, seul Moïse est choisi, car seul Moïse est resté fidèle (avec la tribu de Lévi). Mais Moïse n'accepte pas cette élection, qui est sélection. Pour le peuple d'Israël, l’identité nationale précède l’identité religieuse. Dieu est le Dieu des patriarches, c'est-à-dire le Dieu de tout Israël, du juif fidèle ou oublieux. Utilisons des images modernes : Dieu est le  Dieu du juif de Tel-Aviv et du juif de Jérusalem. Bien sûr, la vocation d'Israël se situe du côté de la fidélité, du côté de Jérusalem, du côté de la maison d'étude, mais tout juif est un Moïse potentiel. Comme l'enseigne Rambam : « Tout homme peut choisir d'être comme Moïse ou comme Bilaam. » Moïse met alors sa propre existence spirituelle en jeu pour sauver tout Israël. Il est exemple du vrai pasteur. Son  pouvoir est vraiment un sacerdoce, et non une domination.

 

Cette occultation de Moïse dans notre paracha souligne vraiment son humilité. Il n’existe que pour Israël. Il ne tombera jamais dans l’abus de pouvoir, il restera jusqu’au bout le berger fidèle, fidèle à Dieu et fidèle à son peuple, l’un n’allant pas sans l’autre.

 

Philippe HADDAD

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